Le recrutement par le bouche-à-oreille

Par Isabelle Vidal-LeonLe 11 mars 2018

Que vaut encore de nos jours, le recrutement par le bouche-à-oreille ? L’avènement des réseaux sociaux a sans doute amplifié ce phénomène vieux comme le monde. Et si c’était le contraire qui se produisait en réalité ? En matière de recrutement, les techniques et les technologies ont évolué pour proposer aujourd’hui, un concentré de services.

Pourtant trouver un emploi ne constitue pas nécessairement une simple formalité.

Avenir du recrutement par le bouche-à-oreille

Être présenté à un recruteur, le pied ! Mais ne rêvez pas debout ou éveillé. Vous disposeriez du même niveau de chance d’emporter le jackpot au jeu de l’Euromillions ; à la fin, seule une poignée de privilégiés en profite réellement. Le recrutement par le bouche-à-oreille est de moins en moins utilisé dans la grande majorité des entreprises. Il est vrai que dans le domaine des TPE et de l’artisanat, c’est encore la méthode qui fonctionne le mieux. La raison à cela ? L’offre est très limitée. Un ou deux postes par an au maximum. L’entrepreneur ne veut pas se tromper. Il mise sur ses connaissances proches pour l’aider à trouver la perle rare.

Les petites entreprises n’ont pas les moyens d’investir des milliers d’euros dans le recrutement.

Le recrutement par le bouche-à-oreille, c’est totalement gratuit. Si cela ne fonctionne pas, à l’arrivée, la déception est relativisée tant l’embauche n’aura pas impliqué de casser sa tirelire. Notons toutefois que cette méthode pour le moins très artisanale peut conduire à quelques brouilles. En effet, si le candidat ne fait pas l’affaire, mais qu’en prime, il a causé des dégâts à l’entreprise, le recruteur se souviendra bien de la personne qui aura joué l’entremetteur. Et dans certains cas, cela peut coûter une franche amitié !

Avis d'Expert

En matière de recrutement, le bouche-à-oreille connaît ses limites.

Recruter le frère de son pote, la cousine d’un client ou le neveu d’un fournisseur, ce n’est pas incongru. Le problème de ce type de recrutement encouragé par une forme de proximité avec les acteurs concernés, c’est la difficulté de faire matcher l’offre d’emploi avec le profil recherché. Recruter un collaborateur ne doit pas conduire à se rabattre sur le premier venu au prétexte qu’une personne de confiance me l’a présentée.

Faut-il que ce postulant justifie de ses qualités académiques et puisse faire valoir un parcours professionnel intéressant.

Le recrutement par le bouche-à-oreille n’exonère pas une certaine vigilance et le respect de quelques règles fondamentales en la matière. Il faudra commencer par exiger un curriculum vitae (CV), et procéder dans la foulée à un entretien d’embauche de visu. Rien ne doit être laissé au hasard. N’oublions pas qu’un mauvais recrutement, c’est un mauvais investissement. L’âme du chef d’entreprise ne doit pas perdre cela de vue. Bien que le coût du recrutement soit nul ou modique, les semaines ou les mois à rémunérer une personne qui ne donnera pas satisfaction en finalité peuvent constituer un gouffre financier en bout de course !

Témoignage

Le salaire versé, le temps passé à l’intégration, les frais fixes supplémentaires, les charges sociales et patronales à payer, l’organisation revue et adaptée, tout cela représente des frais réels qui peuvent vite partir en fumée si on n’y prend pas garde.

Le recrutement c’est une question de méthode, d’opportunité et de réflexion. On ne recrute pas pour aider un ami ou faire plaisir à un copain. Il ne s’agit pas non plus de dépanner une personne qui galère. Prendre à son service un futur employé, c’est faire le pari de s’engager contractuellement avec elle. Il vaut mieux ne pas miser trop gros ! Dans le même temps, c’est normal de souhaiter de la personne recrutée qu’elle s’engage réciproquement aux côtés de l’entreprise qui lui propose un vrai emploi. Juridiquement parlant, l’employeur est en droit d’escompter une exécution de bonne foi du contrat de travail par le salarié nouvellement intégré à son équipe (article L1222-1 du Code du travail).

Le recrutement par le bouche-à-oreille au secours des discriminations

Le recrutement par le bouche-à-oreille peut être une arme contre les discriminations à l’embauche. Farida, Youssouf ou Bao pourront être recrutés sans craindre le regard des autres. Être présenté par un proche, c’est forcément franchir sans encombre ces barrières liées à la discrimination à cause de son prénom, de son apparence ou de son lieu de résidence. Cela étant dit, il faudra faire l’effort de répondre aux attentes du futur employeur. Le recrutement par le bouche-à-oreille est sans nul doute l’allié de la discrimination positive. Cette pratique est connue pour favoriser le traitement réservé à des minorités. Le but est qu’elles puissent disposer d’un capital « égalité des chances » du même niveau que n’importe qui.

Les discriminations à l’embauche ont la dent dure et toute aide en matière d’accès à l’emploi est salutaire.

De nombreuses personnes souffrent des discriminations dans le cadre de leur recherche d’emploi. Alors, un coup de pouce du destin est toujours apprécié. Les personnes qui ont profité d’une mise en relation, d’un renvoi d’ascenseur, sont reconnaissantes. Elles ne veulent pas décevoir et surtout, elles savent saisir leur chance. Dans ce type de recrutement, la motivation est à son comble et la détermination à relever les défis se trouve amplifiée.

Le recrutement par le bouche-à-oreille ne fait pas tout !

Jobs d’été, emplois saisonniers, emplois étudiants, emplois de remplacement, il existe de nombreux cas où trouver du travail passe indubitablement par le bouche-à-oreille. La restauration, les métiers du bâtiment, de l’artisanat ou de l’agriculture sont assez familiers de ces pratiques de recrutement. Les salariés d’un jour se refilent les adresses, les bons plans lorsqu’ils savent qu’un compagnon de route rencontre une période difficile. D’une année à l’autre, on se file des rancards pour aller faire les vendanges par exemple. Les petits boulots ou les jobs d’un soir trouvent souvent preneur grâce au recrutement par le bouche-à-oreille. L’emploi est direct, la durée de la mission est courte, le gain est plafonné, mais tout le monde y trouve son compte.

Lorsque le bouche-à-oreille fonctionne, l’emploi peut venir au secours de personnes en carafe.

Pourtant, le bouche-à-oreille ne fait pas tout. Trouver un emploi durable et qui réponde à ses attentes ne peut pas uniquement reposer sur une mise en relation amicale ou bienveillante. Il existe de nombreuses manières de s’y prendre. Le bouche-à-oreille « numérique » peut être une solution. En effet, les réseaux sociaux comme LinkedIn ou Viadeo offrent toute une palette de possibilités pour être repérés par des recruteurs potentiels. Il suffit parfois d’un rien ou d’un coût de génie pour que votre CV ou votre profil soit préféré à un autre. Les candidats qui veulent encourager leur bonne étoile rivalisent de techniques et fourmillent d’idées. Tout est permis tant que cela aide à dénicher un emploi sérieux.

Précision de l'auteur

Le CV vidéo, les articles coup de poing ou les CV très travaillés graphiquement sont des axes pris par ces centaines de postulants à un emploi pour être vu.

Le bouche-à-oreille sur les réseaux sociaux prend la forme de recommandations ; elles sont souvent bien vues par les recruteurs. Les personnes qui vous recommandent, évaluent vos compétences dans différents domaines et postent un message encourageant nourri d’une récente collaboration. Tout cela est chaleureux la plupart du temps. Le recrutement par le bouche-à-oreille en ligne s’inscrit finalement dans son temps ; il devient un recrutement participatif. On parle alors de recrutement par cooptation ou de parrainage. Dans un prochain article à paraitre, je vous explique tout sur ce nouveau mode de recrutement.

La cooptation tend effectivement à se développer, il serait dommage de passer à côté !

Auteur de l'article: Isabelle Vidal-Leon

Juriste en droit privé et droit social, Isabelle exerce en indépendante depuis quelques années le métier de conseil aux entreprises et de formatrice en droit social. Elle travaille également depuis quelques années comme consultante auprès des particuliers pour le traitement de litiges divers liés au travail.