Pourquoi et comment recourir à un conseiller du salarié ?

Par Florian BenoistLe 29 mars 2020

Qui peut incarner le conseiller du salarié et pour quelle occasion au juste ? Tout salarié convoqué à un entretien préalable au licenciement a le droit à une assistance. Dans les entreprises pourvues d’un CSE, tout salarié peut s’y coller. En effet, comme le rappelle la loi, cette mission relève de quiconque sera sollicité par un salarié. Dans bien des cas, ce sont toutefois les élus du CSE qui s’en chargent.

Mais que se passe-t-il dans les entreprises dépourvues de Comité Social et Économique ?

C’est là qu’intervient le recours au conseiller du salarié.

Qui est le conseiller du salarié ?

Depuis le 1er janvier 2020, toutes les entreprises de plus de 11 salariés doivent avoir mis en place un CSE. Cette nouvelle instance unique réunit désormais tous les représentants du personnel. C’est donc au CSE que reviennent désormais les prérogatives auparavant attribuées aux Délégués du Personnel. Parmi celles-ci, on trouve l’accompagnement du salarié convoqué à un entretien préalable de licenciement.

S’il n’y a pas de représentant du personnel dans l’entreprise, le salarié se fait alors assister par un conseiller professionnel.

Celui-ci est externe à l’entreprise. Il est plus couramment désigné comme le conseiller du salarié. Celui-ci a un rôle limité à l’assistance et au conseil. À ne pas confondre avec un conseiller juridique ou un avocat qui représente le salarié en justice. Le conseiller du salarié peut être toute personne bénéficiant de solides connaissances du droit social et des relations entre employeurs et salariés. En revanche, il ne peut pas s’agir de conseillers prud’homaux en activité. Il obtient une carte officielle du ministère du travail, pour attester de sa qualification. Les procédés de fabrication de l’entreprise bénéficie du secret professionnel qui incombe au conseiller.

Idem pour toutes les informations à caractère confidentiel définies par l’employeur.

Quels sont les moyens mis à disposition du conseiller du salarié ?

Le conseiller du salarié agit en qualité de bénévole. Mais il a droit à 15 heures rémunérées chaque mois pour accomplir cette tâche. Son employeur se fait alors rembourser par l’État. Hors de l’entreprise, on considère que le temps passé par le conseiller pour l’exercice de sa mission comme une durée de travail effectif. Ce qui permettra de calculer sa rémunération, congés ou ancienneté. On limite strictement cette autorisation d’absence au cadre des entretiens auxquels il se rend.

L’employeur ne peut s’opposer au droit de s’absenter de son salarié agissant en qualité de conseiller du salarié.

Il doit également lui accorder, à la demande du salarié conseiller, une autorisation d’absence pour formation à sa mission, dans la limite de deux semaines. Le conseiller du salarié bénéficie par ailleurs d’un statut de salarié protégé. Il ne peut être licencié qu’après autorisation de l’inspecteur du travail. Ce statut le protège jusqu’à 12 mois après la cessation de ses fonctions en tant que conseiller du salarié.

Sollicitation du conseiller du salarié pour une procédure de licenciement

Tout salarié qui reçoit une convocation à un entretien préalable au licenciement doit être prévenu qu’il peut se faire accompagner. Cela s’applique à toute forme de licenciement (économique, motif personnel) ou rupture conventionnelle. S’il ne peut faire appel au CSE, il peut choisir un conseiller du salarié dans la liste des conseillers du salarié de son département. Cette liste est disponible en mairie ou auprès de l’Inspection du travail. Les coordonnées de chaque conseiller y apparaissent, ainsi que leur profession et éventuellement leur appartenance syndicale. La liste est renouvelée tous les trois ans par la DIRECCTE, mais peut être complétée à tout moment.

Le salarié convoqué choisit ainsi parmi les conseillers, et prend contact avec lui pour lui faire part de son souhait de se faire assister pour un licenciement.

Il communique la date, l’heure et le lieu de son entretien. Si le conseiller n’est pas disponible, le salarié a le droit de faire appel à un autre conseiller. C’est au salarié d’informer son employeur de la présence du conseiller à l’entretien préalable. L’employeur peut demander la justification de sa qualité de conseiller, mais il ne peut s’opposer à sa participation à l’entretien.

Garantie de l’exercice des fonctions du conseiller du salarié

L’article L1238-1 du Code du travail est le texte qui encadre les pénalités applicables en cas de délit d’entrave à l’exercice des fonctions de conseiller du salarié. Si l’employeur s’oppose ou tente de s’opposer à l’exercice des fonctions de conseiller, il risque jusqu’à 1 an d’emprisonnement et/ou une amende de 3 750 euros. Ces dispositions s’appliquent aussi bien à l’employeur du conseiller, qui s’opposerait à l’absence de celui-ci pour l’exercice de ses missions, qu’à l’employeur du salarié conseillé, qui refuserait l’assistance d’un conseiller à son employé.

Quel est le rôle du conseiller du salarié pendant l’entretien de licenciement ?

Le conseiller du salarié a un rôle limité à la fonction d’assistance et de conseil. Ce n’est pas un avocat, et il n’a pas de pouvoir de décision ou d’opposition. Sa présence permet de garantir le bon déroulement de l’entretien. En assurant ainsi que la forme est respectée, il permet au salarié de se concentrer sur le fond de sa défense. Le salarié et son conseiller pourront avoir préparé ensemble l’entretien, en amont.

Au cours de l’entretien, le conseiller peut par exemple rappeler à l’ordre l’employeur afin de faire respecter le partage du temps de parole.

Il peut également préciser le cadre formel d’un tel entretien afin de recadrer une démarche déstructurée. Enfin, il peut soutenir moralement le salarié et demander à faire une pause au cours de l’entretien. S’il n’a pas vocation à défendre le salarié, il peut cependant donner des informations pouvant servir les intérêts du salarié et encourager le débat. Il peut ainsi intervenir, demander des explications à l’employeur et compléter celles du salarié. Il a le droit de présenter des observations, mais pas de défendre le salarié.

Le conseiller doit en fait pousser l’employeur à s’expliquer le plus possible sur les raisons l’ayant poussé au licenciement.

Que se passe-t-il ensuite ?

Le rôle du conseiller du salarié ne s’arrête pas forcément à la fin de l’entretien préalable au licenciement. En effet, le salarié peut lui demander à l’issue de l’entretien, la rédaction d’un compte‑ rendu. Celui-ci devra être le plus complet et le plus fidèle possible, rendant compte de l’ensemble des informations entendues durant l’entretien et les faits dont le conseiller a été témoin. Ce document peut se révéler important, car il pourra être reconnu comme preuve recevable par un juge, en cas de litige.

Si le licenciement est prononcé par l’employeur à la suite de l’entretien préalable, la mission du conseiller du salarié s’arrête là.

Il peut ensuite être du rôle de la DIRECCTE de prendre le relais quant au respect de la procédure. Si le salarié conteste le licenciement pour vice de procédure ou sur les faits exposés, il peut choisir d’assigner son employeur au Conseil des Prud’hommes. Dans ce cas-là, ce n’est plus non plus le conseiller du salarié qui l’assistera, mais un avocat.

Concluons sur le droit de se faire assister

Tout salarié a le droit de se faire assister lors d’une éventuelle procédure de licenciement. Et ce, quelle que soit la taille de son entreprise. Ce rôle est traditionnellement celui des représentants du personnel, donc du CSE. Cependant, il existe une parade pour les entreprises qui n’en disposent pas. C’est là qu’intervient le conseiller du salarié.

Le salarié peut aussi choisir de venir seul à son entretien préalable. Mais il serait dommage de se priver de la chance d’être conseillé !

Auteur de l'article: Florian Benoist

Juriste en droit social depuis 5 ans, Florian est un jeune dynamique et talentueux qui a œuvré dans différents cabinets d’avocats avant de prendre son envol en tant qu’autoentrepreneur. Il est désormais consultant et formateur à son compte et travaille notamment pour des TPE, associations, syndicats et des comités d’entreprise.